Annonce d’un scandale politique autour des candidatures gabonaises à la CEEAC

La promesse d’une « nouvelle République » semble déjà bien entachée. À peine un an après l’arrivée au pouvoir du Président Brice Clotaire Oligui Nguema, certains réflexes du passé refont surface. Au lieu d’un État tourné vers le mérite et l’unité, la gestion des candidatures du Gabon à la Commission de la CEEAC révèle une réalité bien plus sombre. Le retour d’un tribalisme d’État, désormais assumé et instrumentalisé.

Au cœur du scandale, la désignation des représentants du Gabon aux six postes à pourvoir dans la nouvelle Commission de la CEEAC. Le 2 juillet 2025, le Président de la République adresse une correspondance officielle (n°000971/PR/SG/CSCD1) au Président de la Commission, précisant les candidatures retenues par la Présidence. Acte souverain, constitutionnel, incontestable.

Mais quelques jours plus tard, coup de théâtre. Le ministre des Affaires étrangères transmet, par note verbale, une toute autre liste. Deux noms y figurent, choisis par ses soins, sans consultation ni respect des instructions présidentielles. Informé de cette initiative unilatérale, le président de la République lui demande alors de revoir sa position et de prendre en considération l’ensemble des postulants gabonais, comme l’exigeaient les consignes initiales. En réponse, plutôt que de soumettre une liste exhaustive et équitable, le ministre se contente d’ajouter un troisième nom à la liste initiale. En tête de cette nouvelle version figure celui de son propre directeur de cabinet et cousin, Éric Parfait Mbaye, proposé pour le poste stratégique de Vice-Président de la Commission. Un affront direct à l’autorité présidentielle. Pire encore, une manœuvre tribale grossière.

Dans un régime présidentiel comme celui du Gabon, la politique étrangère est une prérogative exclusive du chef de l’État. La diplomatie, domaine réservé. Que le ministre se permette ainsi de court-circuiter une décision présidentielle n’est pas seulement une insubordination grave. C’est une crise de régime. Un acte politique lourd de conséquences diplomatiques.

Mais l’essentiel est ailleurs. Le fond de cette affaire expose un mépris absolu du mérite. Le choix d’un candidat controversé, au bilan comptable entaché, relègue aux oubliettes des profils de haut niveau comme le professeur Gabriel Zomo Yebe ou la docteure Hortense Nguema Okome. Tous deux largement plus qualifiés. Leur seul tort ? Ne pas appartenir au « bon » groupe ethnique.

Cette affaire sonne comme un aveu. Le tribalisme n’est plus un secret honteux, c’est un mode de gouvernance. Des proches du pouvoir s’en servent pour verrouiller les postes, détourner les procédures, favoriser les leurs. Le mérite est piétiné, l’unité nationale fracturée.

Dans une diplomatie sérieuse, un tel abus vaudrait interpellation au Parlement, voire limogeage immédiat. Mais au Gabon, la question reste entière, qui commande réellement ? Le Président de la République ou les barons communautaristes ?

L’enjeu dépasse la simple nomination. Il touche à la crédibilité de l’État, à la cohésion nationale, à l’image du Gabon sur la scène régionale. La CEEAC est une institution stratégique. S’y faire représenter par des profils entachés de conflits d’intérêts, sans transparence ni légitimité, revient à saboter l’influence gabonaise.

Il est temps que le Chef de l’État reprenne la main. Fermement. Car cette dérive n’est pas seulement un scandale diplomatique. C’est un poison politique. Et il est en train de s’infiltrer dans tous les rouages de la République.

Un seul mot d’ordre , méritocratie ou faillite.

Edouard Dure

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