Cent jours de pouvoir, et déjà le feu des critiques. Ce 19 août, l’ancien Premier ministre Alain Claude Bilie By Nze est sorti de son silence. Dans une déclaration offensive, il a fustigé la gouvernance actuelle, accusant le pouvoir de manipulation, de diversion et de silence stratégique. Une sortie médiatique qui, si elle a le mérite de poser des questions, mérite elle-même d’être questionnée.
Trois sujets principaux ont rythmé son propos : L’abandon de la géopolitique au profit de la compétence, Le silence sur le dossier de l’île Mbanié, Les contradictions de la politique économique et sociale du gouvernement
En apparence, une déclaration d’homme d’État soucieux de la nation. Mais en démocratie, la critique est un droit. Et en démocratie toujours, il est aussi permis de se demander, qui critique, pourquoi, et avec quelle crédibilité ?
Bilie By Nze se positionne désormais comme le chantre de la transparence, de la justice sociale et de l’exemplarité politique. Il réclame un financement équitable des partis, des minimas sociaux pour la jeunesse, et des réformes structurelles pour Libreville.
Mais comment ne pas s’étonner devant tant de lucidité soudaine, de la part d’un homme qui fut, pendant des années, un rouage essentiel du régime Bongo ? Ministre, porte-parole, Premier ministre… Il a été de toutes les décisions, y compris celles qu’il condamne aujourd’hui.
L’abandon de la géopolitique ? Il en fut un des bénéficiaires. La gestion opaque des fonds publics ? Il l’a longtemps défendue. L’affaire de l’île Mbanié ? Il n’en parlait guère, hier encore.
Il ne s’agit pas de nier à quiconque le droit de changer. Mais il est légitime de se demander si Bilie By Nze est-il mû par la conviction ou par l’opportunisme politique ?
Son parti, « Ensemble pour le Gabon », cherche à exister dans un nouveau paysage post-Bongo. Et dans cette recomposition, frapper fort, tôt, et au bon moment peut s’avérer stratégique.
Le peuple gabonais n’est pas dupe. Il écoute, il observe. Il se souvient. Et il sait faire la différence entre une critique sincère et un revirement dicté par les circonstances.
Oui, le gouvernement doit répondre aux interrogations. Oui, les cent jours de pouvoir méritent un vrai bilan. Oui, l’opposition a un rôle essentiel à jouer. Mais pour être audible, la critique doit être cohérente. Elle doit s’accompagner d’humilité et d’une part de responsabilité. On ne peut se muer en justicier après avoir été juge et partie.
Dans ce nouveau chapitre de la vie politique gabonaise, les citoyens attendent des actes plus que des mots. Des projets plus que des procès. Et surtout, une opposition sincère, désintéressée, constructive.
La parole est libre. Et c’est tant mieux. Mais dans un pays en quête de renouveau, de justice et de vérité, chacun doit parler avec le poids de son passé.
Alain Claude Bilie By Nze veut être une lumière dans l’ombre ? Qu’il commence par éclairer son propre rôle dans les années d’avant. Car l’habitude, dit-on, est une seconde nature.
Edouard Dure