Le ministère des Affaires Étrangères s’illustre une fois de plus dans une gestion qui divise, choque et inquiète l’opinion. À l’occasion du processus de renouvellement de l’exécutif de la CEEAC, la diplomatie gabonaise donne le sentiment d’une double voix au sommet de l’État. Et ce, au mépris des instructions de la plus haute autorité du pays.
Le 2 juillet 2025, la Présidence de la République envoie une correspondance officielle à la CEEAC pour présenter six candidatures gabonaises aux postes de commissaires. Un choix stratégique, visant à maximiser les chances du Gabon sur la base de la compétence, de l’expérience et de la diversité des profils.
Mais le 14 juillet, coup de théâtre. Le Ministre des Affaires Étrangères, à rebours de cette ligne présidentielle, adresse une note verbale à la CEEAC limitant les candidatures gabonaises à deux noms seulement : Eric Parfait MBAYE NKEZE et Marcel MAPANGOU MOUSSADJI. Une initiative personnelle, non validée par la Présidence, qui installe un climat de défiance politique inédit.
Le problème va au-delà de l’insubordination. Les deux candidats défendus par le Ministre soulèvent de graves soupçons de conflits d’intérêt.
Eric Parfait MBAYE NKEZE est non seulement Directeur de cabinet du Ministre, mais aussi ancien Agent comptable de la CEEAC (poste à mandat qu’il a occupé sur la période 2018-2023), toujours sans quitus pour sa gestion. Il est concerné par l’audit des comptes exigé par la conférence des Chefs d’Etat de la CEEAC sur la période 2020-2023. Il est, en outre, issu de la même communauté ethnique que son parrain politique. C’est aussi lui que le Ministre a chargé de gérer la question des candidatures.
Marcel MAPANGOUMOUSSADJI, lui, est directement lié à l’actuel Directeur par intérim des ressources humaines de la CEEAC, son propre frère. Des liens familiaux évidents dans un processus de recrutement international, qui fragilisent la crédibilité du pays.
Cette gestion tribale assumée écarte des profils validés par le Chef de l’État lui-même, plus solides, expérimentés et reconnus internationalement.
Le Gabon aurait pu jouer la carte de l’ambition régionale, en misant sur une équipe de haut niveau. Mais le choix du Ministre le réduit à une candidature affaiblie, divisée, sans vision, ne comptant qu’éventuellement sur un deal honteux avec l’exécutif sortant de la CEEAC pour possiblement modifier les classements pour ses candidats, en contrepartie de la défense du Gabon, du bilan financier, dit-on catastrophique de l’actuelle commission.
En limitant la liste à deux noms controversés, le pays s’expose à une double perte :
1. Diplomatique, en affaiblissant ses chances de faire élire des représentants ;
2. Politique, en contredisant ouvertement la volonté du Président de la République.
En 2019, une mauvaise gestion de ce dossier avait déjà entraîné l’absence du Gabon aux postes de commissaire à la CEEAC, marquant un recul diplomatique. Aujourd’hui, l’histoire semble se répéter.
Ce dysfonctionnement donne l’image d’une diplomatie bicéphale, où les intérêts ethniques prennent le pas sur l’intérêt national. Un retour à des pratiques que le Chef de l’État s’était engagé à éradiquer.
Ce dossier ravive de vieux démons. Tribalisme, favoritisme, corruption, opacité. En 2025, alors que le Gabon s’engage dans une dynamique de réforme, la gestion actuelle de la CEEAC montre que certaines habitudes persistent.
Le Ministre des Affaires Étrangères semble vouloir pérenniser un système ancien, où l’appartenance tribale prime sur la compétence. Une stratégie à courte vue, qui discrédite l’administration, mine la cohésion nationale et ternit l’image du pays à l’international.
L’heure est grave. Cette affaire révèle des tensions profondes au sein de l’appareil d’État. Elle pose une question fondamentale. Peut-on encore croire au changement si les vieilles pratiques perdurent au sommet ?
Il est temps de mettre fin à ces logiques de clan. Le Gabon dispose de talents nombreux et compétents. Les exclure pour des considérations tribales, c’est non seulement injuste, mais surtout dangereux pour l’avenir du pays.
Il faut que cela cesse. Vraiment.
Jean 1er